Mon
étude de vigne, j’ai sué sang et eau dessus.
(544 1er octobre).
Les
vignes que je viens de peindre sont vertes, pourpres, jaune, à
grappes violettes, à sarments noir et orangés…(544
1er octobre)
Paysage
à ciel bleu au-dessus d’une immense vigne verte,
pourpre, jaune.
Toiles de 30 carrées (jardin du poète) qui m’éreintent
considérablement et doivent me servir à décorer
la maison.
un tableau est aussi difficile à faire qu’un diamant
grand ou petit à trouver (B18 fin septembre).
J’ai du
meilleur : ciel étoilé, pampres, sillons, jardin
du poète.
hier j’ai peint un coucher de soleil. Hier j’ai peint
un coucher de soleil. 545 octobre - 7 octobre
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Lundi
1er octobre
Il semble dans la dernière lettre de Gauguin qu’il
s’apprête à venir bientôt.
La description qu'il fait de lui me touche jusqu’au fond
des fonds.
Même Bernard a dit qu’il viendrait peut-être.
On aurait Gauguin comme chef d’atelier et tout le monde
fera de vrais progrès. La conception qu’il donne
de l’Impressionnisme m’éclaire beaucoup dans
ce que je fais.
Les dessins de Bernard me semblent trop faits à la hâte.
Il a besoin de s’appliquer plus et d’écouter
les conseils de Gauguin.
Je suis très content d’avoir ces tableaux de Gauguin
et Bernard avec dans chacun le portrait de l’autre. Je vais
lui envoyer mon dernier autoportrait en bouddha éternel.
Je suis sûr qu’il se tiendra bien à côté
du sien où il m’a l’air passablement triste
et torturé.
Dans la lettre, il y avait une caricature de moi où je
ne me retrouve pas. D’abord, je ne fume que la pipe et puis
cette position en haut d’un rocher ne peut pas être
moi qui ai horreur du vide. Le quatrième étage où
habite Theo me donnait déjà le vertige… Ces
invraisemblablités m’énervent. Il ferait mieux
de s’appliquer autrement. Il est grand temps qu’il
vienne.
En attendant je ferai du dessin.
Mardi 2 octobre
Dans sa lettre, Wil dit qu’elle préfère la
sculpture à la peinture.
Si elle regardait mieux les fleurs de Monticelli, elle verrait
combien je le continue comme si j’étais son fils
ou son frère.
Je n’arrête pas de penser à Monticelli surtout
quand je suis dans ces jardins. Lui aussi a peint le Midi en plein
jaune, en plein orangé, en plein soufre.
Il faudrait que j’aille à Marseille trouver un lieu
d’exposition pour les Impressionnistes. On ira quand Gauguin
sera là. Je m’habillerai en blanc avec un grand chapeau
jaune et une canne à la Monticelli pour descendre la Canebière.
Mercredi 3 octobre
Le Mistral m’empêche encore de travailler dehors.
J’en profite pour finir ou retoucher certaines études.
Dans l’ensemble, je n’ai pas à y revenir. Je
les ramène toutes faites et je n’ai que peu de choses
à modifier ou à compléter.
Je travaille à corps perdu et je ne peux plus m’arrêter.
Je n’ai plus de couleurs. J’ai encore dépassé
le budget, mais je ne peux pas faire autrement, pris dans la rage
de travail où je suis. Il faudrait que Theo demande à
Thomas d’avancer de l’argent pour me permettre de
ne pas ralentir, de continuer. Je n’ai même pas eu
3 francs pour aller au bordel.
Je n’ai toujours rien reçu de Theo. Je vis à
crédit au café.
Jeudi 4 octobre
Je voudrais faire du portrait, mais pas moyen d’avoir des
modèles.
La conception de Gauguin des tableaux fait de tête ne me
va pas. J’ai trop besoin d’avoir la nature en face
de moi. Je n’ai pas de désir ou de courage pour chercher
à faire autrement pour l’instant. C’est dehors
que la vie se passe et pas dans l’atelier.
Vendredi 5 octobre
Démêler l’essentiel de ce qui constitue le
caractère immuable des choses, chercher derrière
ce qui se présente l’équilibre originel des
choses, simplifier à l’extrême les paysages
pour en faire ressortir les lignes immuables, les couleurs vraies,
voilà à quoi je dois tendre.
Samedi 6 octobre
Je me suis trop habitué et je préfère maintenant
écrire en français à Wil.
Avec ce temps tranquille je me laisse aller.
le vrai et juste commerce des tableaux est de se laisser aller
à son goût, son éducation devant les maîtres,
sa foi enfin.
Dimanche
7 octobre
Les études qui font tableau, je préfère les
finir dans le cadre. L’encadrement est très important.
Il met en valeur ou parfois tue une toile. Je préfère
des cadres simples ou très clairs ou très foncés.
Bernard dit qu'il va venir aussi. Il me propose un échange
avec eux quatre. Laval viendra également et deux autres
qui ont le désir de venir. La vie en commun de plusieurs
peintres, je stipule avant tout qu’il faudra un abbé
pour y mettre de l’ordre et que naturellement ce serait
Gauguin.
L’étude
du bordel que je viens de faire pour Bernard est assez dans le
ton. Les figures montrent bien l’atmosphère de ces
lieux.
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