SERGE
III : AUTOBIOGRAPHIE
Ma
première rupture avec l'art classique des années 50-60
fut en février 1962. Bien avant que j'entende parler de Happening,
j'ai proposé, pour 1 Franc, mon âme à Ben. Le but
était de traiter avec dérision ce que d'autres prennent
tellement au sérieux. C'était la première, mais
non la dernière fois.
Ensuite, je détruisis discrètement et tranquillement toutes
les peintures, paysages et natures mortes que j'avais réalisés
auparavant.
Ma première uvre "contemporaine" fut, sur une
planchette, d'écrire :
"Ne tuez pas mes araignées".
Autrement dit, interdiction de toute ingérence dans mes plafonds.
Le fait d'écrire a été probablement inspiré
par Ben.
Puis un jour, étant en blue jeans, j'achetai dans un tabac des
Gauloises bleues et des Gilettes bleues. Je réalisai que le bleu
était une couleur importante et même la plus importante.
Par exemple, Côte d'Azur, le ciel bleu, la mer bleue, le voile
de la Vierge, le sang bleu, le bleu roi, etc. Dans le commerce, dans
la publicité le bleu est la couleur choc qui s'impose et fait
vendre,
Donc je me suis mis à rêver d'un monde bleu.
Je n'avais pas encore entendu parler de Klein et je me mis à
peindre en bleu tout ce qui me tombait sous la main. Je n'utilisais
pas uniquement le bleu outremer de Klein mais tous les colorants bleus
du bâtiment, les laques, les paillettes de bronze bleu et l'aniline.
Mon idée n'était pas le monochrome et je peignais aussi
des tableaux abstraits avec les bleus différents. Où sont
ils ? J'ignore, je ne travaillais pas pour la postérité.
Puis, après avoir fait le projet de peindre Nice en bleu avec
des fusées chargées d'aniline, je me désintéressai
du bleu.
En juiIlet 1963, George Maciunas passe à Nice et avec Ben, organise
des pièces Fluxus de rue, de bistrot et un concert à
l'Hôtel Scribe. Entre autres pièces, Ben réalise
le "Violon Solo de Nam June Palk" et brise le violon sur une
table. C'est le coup de foudre et une révélation. Je me
fais dédicacer un morceau de violon par Ben.
Au début 1964, Ben, avec d'autres et moi même, réalise
deux concerts Fluxus à Nice puis tous les deux nous montons à
Paris pour le Festival de la Libre Expression qu'organisait Lebel. Concert
Fluxus dans lequel je joue à la roulette russe avec un
vrai revolver et une vraie balle. Deux amis, Robert Bozzi et Una Lintkus
voulaient m'empêcher de le faire et j'ai été obligé
de leur dire que le révolver ne serait pas chargé. D'où
le bruit qui courut comme quoi le révolver n'était pas
chargé. Il l'était, et Robert Filliou, qui devint un de
mes amis les plus chers en a toujours témoigné, parce
qu'il m'avait vu tout de suite après ma performance.
Un jour de 1964, je pense, je lus que les Grecs de l'Antiquité
décoraient leurs amphores, non pour la postérité,
mais pour inciter le consommateur à acheter le vin qu'elles contenaient.
De là j'ai réalisé que le contenant est toujours
fonction du contenu et que primitivement le contenu prime toujours le
contenant.
Contenu-contenant, message-langage, fond-forme, même combat.
Pour matérialiser le concept, je fis des moulages intérieurs
de contenants. Soit des contenus de bouteilles, paquets de cigarettes,
de café, appareils photos, armoires. J'ai réalisé
des contenus d'armoire pour Sigma 5 à Bordeaux en 1969, au Musée
d'Art Naïf à Flayosc en 1973, à Porto (Portugal)
en 1974 et au Centre Georges Pompidou en 1977.
Puis, prenant à rebours le souci des peintres de réaliser
des uvres qui durent des siècles, je fais des tableaux
dont les couleurs disparaissent à la lumière. Je
réalise aussi deux toiles avec des peintures qui ne sèchent
pas. Je suis obligé de m'en débarasser parce que ne
séchant pas, le moindre contact repercute la peinture sur les
mains, sur les vêtements et partout, c'est un cauchemar.
En octobre 1966, nous partons Ben et moi pour présenter des Happenings
et concerts Fluxus à Prague.
Nous y faisons deux prestations avec Dick Higgins, Allison Knowles et
Milan Knizak. L'ambiance générale est pesante, l'endroit
où nous sommes logés est inconfortable et insalubre. Ben
décide brusquement de partir. Je lui rappelle que les Tchèques
attendent encore deux séances mais il ne peut supporter d'attendre
le week end puis encore deux jours -, il part.
La suite est racontée dans mon "Journal
de prison". Je donne mon passeport et un costume à
un soldat. Il va faire ses adieux à sa petite amie en lui disant
par qui il a eu vêtements et passeport et fiche le camp en Autriche.
La petite amie commence à tout raconter à Knizak et à
d'autres et puis va dénoncer tout le monde à la police.
Arrestation. Six mois de préventive. Jugement. Appel. Condamné
à 3 ans de privation de liberté. Je suis emmené
à la section des étrangers de la prison de Prague.
Après quatorze mois de prison on m'expédie en France,
échangé contre un espion tchèque.
La prison ne m'a pas changé, j'y avais toujours affirmé
que j'étais un homme libre avec une prison autour. Par contre,
j'y ai pris conscience de moi-même, d'une certaine force morale,
d'une certaine solidité. J'étais plus sûr de moi.
J'y ai pris conscience également que l'essence de l'art est subversive,
que le geste artistique étant une réaction de l'individu
contre le milieu, le but, conscient ou inconscient de ce geste est de
persuader ce milieu de se modifier.
Je ne répèterai jamais assez qu'il ne faut pas confondre
subversion et contestation.
La contestation est une protestation directe et partisane contre un
état de choses, la subversion suggère un processus de
pensée qui pourrait aboutir à la protestation.
Autrement dit, la contestation est l'aboutissement d'un processus, alors
que la subversion en est le point de départ.
Mars 1968, Marcel Alocco organise une exposition à Lyon, chez
Guinochet et Guillaumon, une exposition sur les nouvelles tendances
de l'Ecole de Nice. Il m'y invite, ainsi que Daniel Biga, Emest Pignon,
Saytour, Dolla, Strauch etj'en passe. Nous y monto-is, Jacques Strauch
et moi en voiture. J'y présente des Christ et des croix.
Des Christ sur porte-manteau, sur disque, dans une gaine de révolver,
dans un aquarium. Pendant la prolifération des tendances formalistes
support-surfaciennes, faire de la dérision, ce n'est pas sérieux.
Concerts Fluxus à Avignon et à Florence.
En juin 1969 Ben et Merino organisent le Festival non-Art.
Pour ce festival, je repeins en vinyl blanc
tous les tableaux à ma portée et je les expose au Yati.
Je le fais pour montrer que ce n'est pas I'uvre originale qui
est importante mais son contenu. Je ne détruis rien, car on peut
revenir vers le passé et décaper le vinyl, rester au présent
et garder la toile blanche ou aller vers le futur en repeignant autre
chose à la place.
C'est à ce moment que je réalise mon geste Auto-stop
avec un piano.
Ben mavait dit que je ne sais quel type de Fluxus avait écrit
un livre avec toutes les pièces possibles et imaginables pour
piano. Je lui ai répondu qu'il pouvait en ajouter deux, auto-stop
et navigation en piano. A la fin de l'année, l'Ecole de Nice
est invitée à participer à Sigma 5 à Bordeaux.
J'y participe en présentant un contenu
d'armoire. C'est un travail de romain que de gâcher vingt sacs
de plâtre et de les verser seau par seau dans l'armoire en montant
sur une échelle. C'est à Sigma que j'ai bien sympathisé
avec Claude Gilli. Il voulait faire un lâcher d'escargots mais
les autres artistes avaient probablement peur de la bave et n'étaient
pas très chauds. Sur quoi, j'ai dit à Gilli que je trouvais
son idée très belle et qu'il pouvait les lâcher
tranquillement sur mon contenu d'armoire.
En 1970, invité à participer à l'expo Environs
Il à Tours, j'annonce que je ferai quelque chose. J'y arrive
en train le 7 mai à deux heures du matin et je m'écroule
dans un hôtel. Le 8 au matin, je vais acheter un pistolet à
amorces d'un aspect réaliste. Je passe voir les organisateurs,
je leur dis mon projet et leur demande de convoquer la presse. Vers
15 h, je monte dans un autobus, deux minutes plus tard, je braque le
chauffeur et lui ordonne de tourner vers la bibliothèque où
il y avait l'expo. A la différence d'un avion, un car peut s'arrêter
en plein vol, surtout s'il y a un agent de police à côté.
Bref, arrrestation. Poste de police, fouille (à poil) interrogatoire.
- Pourquoi vous avez fait ça ?
- Pour faire un geste artistique.
- C'est pas artistique !
- L'année dernière, j'ai fait de l'auto stop avec un piano
comme geste artistique, aujourd'hui j'essaye de détourner un
bus.
- L'auto stop avec un piano, c'est artistique. Détourner les
bus, non.
Que dire ? La nuit, la matinée, le début de l'après-midi
au poste puis on me relâche.
Je passe voir les gens de l'expo et j'ai tout juste le temps de casser
la croûte et de prendre le train pour Montpellier où se
manifestent cent artistes dans la ville.
Là, j'organise un repas dans un restaurant entrée Yaourt
potage Yaourt viande Yaourt légume Yaourt fromage Yaourt dessert
Yaourt, boissons au choix.
En été 1970, je présente chez Ben la première
série de Marines. Comme
public, les copains et une visiteuse (devenue amie par la suite).
Le 2 septembre, je fais célébrer le centenaire de la défaite
de Sedan. Dans une galerie éphémère située
au Pont du Loup, j'ai présenté près d'une centaine
d'objets ou drapeaux tricolores en déniant aux militaires l'exclusivité
du drapeau et en revendiquant les trois couleurs pour tous les objets
d'usage quotidien.
Entre temps, le tribunal de grande instance de Tours me juge par défaut
et me condamne à 500 F d'amende pour violence avec préméditation
pour le détournement d'autobus. Etant plutôt gêné
financièrement, je fais imprimer une circulaire et je fais un
appel au peuple pour payer mon amende. Très rapidement, le total
à payer est couvert et même au delà, ce qui me permet
d'éditer une petite plaquette (tirage de misère) relatant
l'affaire, avec photocopie de documents à l'appui à l'usage
exclusif des donataires (que je remercie de nouveau).
Pendant l'été 1971, Ben organise à la Galerie De
La Salle, à Vence, une exposition sur paravents de ses copains.
Un paravent, c'est trop peu par tête de pipe.
Avec Francis Mérino de Monaco, nous organisons une série
de repas intitulé : FAITES LE VOUS MEMES.
Nous invitons une dizaine de personnes dans un restaurant et leur disons
notre espoir qu'il en sortira quelque chose. Ce furent quelques soirées
bien sympathiques, mais pas plus que les socio-drames, les socio-bouffes
n'ont rien donné.
Il y eut à Flayosc (Var) un restaurant-galerie dont la charmante
propriétaire patronnait des expositions d'art naïf présentées
par Frédéric Altmann.
J'y allais assez souvent avec mon ami Francis Mérino et un jour,
jinventai un peintre naïf. Il y a eu le douanier Rousseau,
le Facteur Cheval, il me fallait un gendarme, ce fut le gendarme
Jean Cibalo (hommage à Brassens). Il n'empêche que
le plumitif de Nice-Matin, édition Var, l'a cité en tant
qu'un des futurs exposants de la Galerie. Il est vrai qu'en parlant
de mon travail il a remplacé le mot subversion par le mot subvention
(lapsus calami).
En 1972, avec Daniel Biga, poète et Jean Mas, plasticien, nous
faisons une série d'expositions dans les MJC de la région
avec chaque fois une soirée pour discuter avec le public. Un
bide. C'est bien parce que le public ne prend pas la parole que nous
la prenons.
En 1973, ça bouge. C'est une année d'activité intense
dans tout le sud de l'hexagone.
En j anvier- février, l'expo Hors Langage, organisée par
Jacques Lepage dans le hall du Théâtre de Nice. Je n'y
expose pas d'uvres, J'y campe. J'ai installé ma tente avec
des pains de fonte pour tenir les tendeurs, mon duvet à l'intérieur,
et moi ayant la clé du théâtre, venant y dormir
tous les soirs. J'y ai trouvé une lettre d'une admiratrice disant
qu'elle comptait me rejoindre dans la tente, cette petite sotte ne l'a
pas fait. Et aussi un mot de Ben qui espérait me piéger
et que j'avais tranquillement enfoncé avec mes pieds au fond
du duvet (le mot). J'y ai invité des amis pour fêter mon
anniversaire et Gabriel Monnet nous a offert deux bonnes bouteilles.
Peu après, à La Rochelle, quarante ou cinquante artistes
sont invités à exposer dans la rue (du Temple).
Pour la rue, il faut de l'art de rue. J'accroche à des cables,
en hauteur, une croix de 2 m 50 de haut sur laquelle est un petit panneau
: "le Christ revient de suite".
Ironie et dérision, bien sûr, mais également le
message contenu dans le nouveau Testament : "Le Christ peut venir
à n'importe quel moment".
A La Rochelle, je réalise que c'est pratiquement la première
fois que je sors de Nice. Je commence à exister dans l'hexagone.
Je rencontre des amis solides : Dominique Jalabert, de Bordeaux, Balbino
Giner de Toulouse, Jacques Pineau de Limoges, José Luis da Rocha,
portugais de Paris.
De là, je suis invité au Festival d'Occitanie à
Montauban. J'y vais, toujours avec ma 2 CV, avec P.A. Hubert.
En roulant, j'explique à Hubert que les incendies de forêts
sont souvent provoqués par des mégots incandescents et
qu'il fallait les mettre dans le cendrier de la voiture. Une fois passés
à Saint Gilles (Gard), je jette tranquillement mon mégot
par la portière en disant : "ça ne passera pas le
Rhône".
A Montauban, il s'agit de faire une uvre éphémère
à partir de matériaux trouvés sur place.
En dehors de Hubert et de moi, tous les autres artistes avaient apporté
leur production habituelle et l'ont accrochée dans le square
Bourdelle.
Comme matériaux, il y avait des planches, du fil de fer et diverses
choses. Je fabriquai une potence sur laquelle je mis l'inscription "Défense
d'accrocher". Puis, n'ayant aucun goût pour l'éphémère,
j'en fis don au musée Ingres, dont le conservateur m'a chaudement
remercié.
Entre temps, dans plusieurs villes il y avait eu des révoltes
dans les prisons. En tant qu'ancien détenu, je me rendais compte
du désespoir auquel il fallait atteindre pour en arriver à
se mutiner. Pour tous ceux pour qui il ne s'agissait que de faits divers,
j'ai pensé et réalisé "les
prisons". C'est très simple : un cadre avec des
barreaux et un miroir derrière. Celui qui s'y voit, s'y voit
en prison. oeuvres exposées à la Galerie Ferrero à
Nice.
Au mois d'août, exposition collective à la MJC de Grasse.
Nombreuses manifestations contre la politique raciste de la municipalité.
Je fais, à la Mairie une demande d'autorisation de lavage
de drapeaux dans la piscine. Autorisation refusée (le Maire
a-t-il eu peur que les drapeaux salissent l'eau de la piscine ?). Tant
pis, je les lave dans un grand baquet, les repasse, les plie et j'y
brode ma signature, de façon qu'on ne puisse plus les déployer.
L'intérêt de ces manifestations collectives, c'est les
rencontres et les contacts avec d'autres artistes.
A Grasse, avec Da Rocha naît l'idée d'une série
d'expositions au Portugal. Il y aura Moucha, Tomek Kawlak, Klassnik,
Pineau, Da Rocha, moi-même et d'autres encore. Le chapitre
portugais s'ouvre sur une proposition du critique Egidio Alvaro
et du galeriste Jaime Isidoro. Ils invitent les artistes à venir
un par un exposer à Porto. Pour payer les frais de route chacun
recevra 1000 F en échange d'une maquette de sérigraphie.
Les sérigraphies seront réalisées par Da Rocha
et réunies en portfolio pour la Galerie Dois à Porto.
Je demande à exposer le dernier. En défi contre le système
totalitaire de Gaetano, j'y amène des affiches de la Commune
de Paris collées sur bois et quadrillées de fil de fer
barbelé. Les gardes-frontière portugais ne s'y
trompent pas. Défense de faire entrer ça au Portugal.
Je les fais téléphoner à la Galerie Dois. Palabres,
coups de téléphone à droite et à gauche
et moi insistant toujours pour passer mes uvres d'art. Cinq heures
plus tard, la solution est trouvée. On attache mes uvres
en paquets, on plombe les ficelles et on me met un gendarme dans la
voiture pour m'accompagner à Porto où tout est mis sous
séquestre. Jaime Isidoro, très dynamique, se démène
comme un beau diable, verse une caution et obtient le droit d'exposer
mes uvres. Le vernissage a lieu le 22 avril. J'avais demandé
qu'on amène quelques gosses du quartier pauvre, pour qu'ils mendient
pendant le vernissage. Ce ne fut pas tout à fait raté,
mais ces gamins de la misère ont trouvé ça si drôle
qu'ils ont fait la manche en rigolant. Il paraît qu'il y avait
aussi des flics en civil.
J'ai reçu au Portugal, de la part de Jaime et de Marcellina sa
femme, un accueil si chaleureux et si généreux que je
pense que je serai toujours leur débiteur.
Trois jours plus tard, une grande émotion, mon travail croise
l'Histoire. C'est le 25 avril, c'est la chute du fascisme, c'est la
révolution des lllets.
Le premier mai est une telle fête populaire, que, ému presque
aux larmes, je rassemble quelques amis à la galerie et symboliquement
je coupe les barbelés sur un panneau que j'intitule "1er
mai 1974, Porto" et je signe. Don de I'uvre au peuple portugais,
bien entendu.
En 1974, je participe encore à deux expos collectives, à
Marseille.
"Marginale 74", à la Vieille Charité, où
je tends un rideau de barbelés entre deux salles en ne laissant
qu'un étroit passage.
Et à Annemasse, à l'occasion de l'élection de Monsieur
Giscard d'Estaing, je présente le tombeau de l'Imbécile
Inconnu, sous forme d'une urne géante sur laquelle est l'inscription
: "A l'imbécile inconnu la patrie reconnaissante".
Je participe aussi à une expo-débat chez Ben, pour ou
contre Serge III.
Puis je commence mon travail sur le coup de feu. Je présente
en avril 1975 à la Galerie Jacques Boudin à Nice trois
séries :
a) les affiches de la commune fusillées à coups de chevrotines,
b) des panneaux de bois présentant sur la même face une
entrée et une sortie de balle,
c) une série de photos de cadavres de la bande à Bonnot
à la morgue.
Apparition de la tendance dite Art Sociologique sous le patronage
de Bernard Teyssèdre, je participe à une expo "Art
contre Idéologie". J'y expose une affiche de la Commune
sous barbelés, mais de 1m x 1m50. Ça fonctionne bien,
dit Marcelin Pleynet.
Jean Mas organise un stand Ecole de Nice dans le cadre du Festival du
Livre, au palais des Expositions. J'y présente un grand plan
de Nice sous barbelés tricolores. L'année suivante, j'apprends
que les organisateurs avaient modifié l'itinéraire du
ministre, pour lui éviter de voir cette pièce. Non content
de détourner les autobus voilà que je détourne
les ministres.
En été 1975, Claude Viallat et Pierre Alain Hubert organisent
au stade Vallier à Marseille une action, en principe, non stop,
intitulée : "Les Six Jours de la Peinture". J'y participe
en faisant cuire des nouilles bleues en hommage à Yves Klein,
j'y rempaille des chaises et décerne mes premiers "Brevets
de spectateur" .
Pendant les cinq derniers jours, je joue La paranoïa de l'artiste"
en me recouvrant petit à petit de pansements et en accusant,
tantôt l'un, tantôt l'autre, de m'avoir bousculé,
frappé, jeté à terre etc...
A la fin, je me suis redressé et ai offert à boire aux
participants.
En 1976, Dany Bloch m'oblige, presque de force, à participer
à l'exposition "Les Boites" à l'ARC. J'y mets
un tableau de boites d'allumettes,
une prison, une boite contenu-contenant
de paquet de Gauloises.
J'en profite pour confirmer à Dany mon estime et mon affection.
En 1977, je réalise une uvre nationaliste occitane composée
de pavés rouges avec la croix occitane jaune et d'une dame de
paveur tricolore, je l'expose pendant près de deux mois dans
une vitrine d'une coopérative de papeteries, dite "Le bocal
aux sculptures" et l'année d'après, je l'amène
à Limoges pour l'exposition "Nouveaux Langages", organisée
par Egido Alvaro.
Depuis longtemps Fréderic Altmann envisageait d'exposer mon travail
dans sa Galerie l'Art Marginal.
Au début de l'été 1978, on se décide pour
septembre. On dit souvent que le milieu d'artistes est un panier de
crabes, eh bien, cette fois on a menti. Au mois de juin, je m'étais
fracturé le poignet gauche, ce qui me limitait beaucoup et brusquement
tout, surtout le catalogue, fut réalisé avec l'aide des
copains.
Noël Dolla m'a aidé à transporter les uvres
à la GAC et les a photographiées. Bruno Mendonça
m'a avancé l'argent pour acheter le papier.
Philippe Tixier m'a envoyé chez un de ses amis pour tramer les
photos et faire les plaques offset à un prix super concurrentiel
et dans un deuxième temps m'a imprimé le catalogue, ce
qui fait que je n'ai eu qu'à le réunir et le coller. De
plus, Frédéric m'a remboursé les frais occasionnés
par la réalisation de ce catalogue.
Le vernissage fut un grand succès d'estime et d'amitié,
ce qui pour moi était plus important que les ventes (qui furent
faibles).
1979 - année bien remplie puisqu'elle commence par une exposition
à Toulouse où je présente un tableau jeu, consistant
en un mur sur lequel était inscrite en latin la formule "par
ce signe tu vaincras" et douze panonceaux recto-verso, soit vingt
quatre signes ou emblèmes que le public était invité
à placer comme signe vainqueur.
Cette pièce fut présentée dans les rétrospectives
Fluxus a l'ELAC à Lyon et à la GAC à Nice.
L'automne 1979 fut consacré à la préparation de
la manifestation du centenaire de la naissance de Staline, qui
eut lieu dans les locaux de Calibre 33, is it art ?
Ayant envoyé une circulaire et ayant demandé aux destinataires
de la répercuter, j'eus près de soixante envois dont certains
des Etats-Unis, d'Italie ou d'Allemagne Démocratique. Ce fut
un gros travail pour une seule journée de présentation
mais quelle journée ! Les locaux de Calibre 33 étaient
pleins de monde, j'y lus un discours, Farioli et Giovanelli y firent
de remarquables performances. Puis je soufflai quelques jours et filai
à Porto pour y présenter une nouvelle série d'agressions
d'identité. J'ai failli y attraper une dépression en réalisant
et en attendant le catalogue, qui finalement fut prêt à
temps, presque à la minute. Puis, dans la foulée, j'y
passais Noël et le Jour de l'an dans l'amicale et chaleureuse ambiance
de mes amis Jaime et Marcelline. En passant près d'un local maoïste
à Lisbonne, j'ai constaté que eux fêtaient le 1er
centenaire de Staline.
Déjà en 1974, j'avais fait une petite écriture
"Attention art méchant" ; en 1980, je résolus
de l'illustrer en fabriquant des armes, épées, masses
d'armes, fléaux de guerre, crocs, hache de bourreau, francisque,
etc... et en quadrillant de barbelés
des personnages de bande dessinée (innocentes victimes de l'art
méchant) et des pin-ups représentées sur des affichettes
de Détective qui étaient beaucoup plus ambigües.
Je pense que tout cet outillage provoquait des réactions contraires
et incitait plutôt à la non-violence qu'à la violence.
Entre temps, j'avais adhéré à l'association Calibre
33 et nous avons réalisé plusieurs manifestations ensemble.
Une exposition des artistes de Provence Côte d'Azur; tout fut
réglé par courrier et par transporteur, je ne peux rien
en dire.
Je nous fis inviter à la Ilème Biennale de Vila Nova da
Cerveira au Portugal et dans la foulée, à la semaine d'art
de Vila de Conda, également au Portugal.
L'année suivante, 1981, nous fûmes invités à
exposer à la Chapelle des Célestins, dans le cadre du
Festival d'Avignon. L'exposition "Midi et demie" était
organisée par Alain Avila. La manifestation s'est déroulée
au milieu de heurts et d'engueulades, sans que, le temps ayant passé,
il y eut des causes vraiment graves à cela. Il n'empêche
que ce fut une belle manifestation et il y eut plusieurs performances
de haut niveau, notamment celles de Daniel Farioli et de Gilbert Pedinielli.
J'y avais présenté un second tombeau de l'imbécile
inconnu à l'occasion de l'élection de Monsieur François
Mitterand.
En 1981, commencèrent des divergences dans la politique de fonctionnement
du groupe entre les autres et moi-même, ce qui aboutit, le 1er
mai 1982, à ma démission. J'assumai ma place dans le groupe
lors de notre exposition au Couvent Royal de Saint Maximin où
je présentai la série de marines qui me fut achetée
par Claude Foumet, et une série de personnages de bandes dessinées
en situation dans l'Histoire de l'Art.
En 1984, je participais à l'exposition organisée par le
CNAC : "L'écriture dans la peinture", non pas à
la villa Arson, mais dans les lieux dits parallèles, c'est-à-dire,
à l'Arroyo, à Calibre 33 et à la Différence.
Puis je fus invité par Alain Gibertie à participer à
une expo Fluxus et à un concours de pétanque artistique,
en Dordogne, dans le Périgord.
Il s'agissait, pour chaque artiste, de réaliser un terrain de
pétanque et d'y faire jouer les champions du pays. Il y en eut
de drôles, il y en eut qui auraient pu tourner au tragique.
Les organisateurs, bien que pleins d'enthousiasme, furent trop optimistes
dans leurs prévisions budgétaires et, surtout Alain Gibertie,
subirent un lourd fiasco pécuniaire. Détail amusant, c'est
au Périgord qu'on a servi aux artistes des raviolis de conserves.
AUTOBIOGRAPHIE
ARRETEE EN 1984.
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