LA
CUISINE JUIVE MAROCAINE (2)
ENTREES
Le
mhammar
un plat basique qui vient du plus loin de ma petite enfance et probablement
de l’histoire culinaire… C’est une omelette aux
pommes de terre dorées, croustillante, belle à voir.
J’ai tout ce qu’il faut (persil, œufs, petits pois,
carottes).
D’abord éplucher puis faire bouillir quelques pommes
de terre. Les écraser à la fourchette dans un large
plat. Ajouter le persil, une demi-boîte de petits pois, deux
carottes découpées en dés. Saler, poivrer.
Admirer la préparation. Le fond jaune pâle grumeleux
(la terre) est parsemé de vert persil (les herbes). Sur ce
terreau, les petites boules vert tendre des petits pois contrastent
agréablement avec le rouge orangé des blocs de carottes.
Vous avez de nouveau recréé un paysage. Il y manque
le soleil. Le voilà. Vous cassez un œuf. Un premier
soleil couvre ce monde.
Se laver les mains à l’eau tiède avant de les
plonger dans cette mixture à température du corps.
Malaxer avec douceur. On retrouve cette sensation exquise de plonger
ses mains dans quelque chose qu’on reconnaît.
Casser ensuite les six œufs un à un. Malaxer jusqu’à
l’obtention d’une épaisse bouillie jaune. C’est
prêt.
Choisissez un récipient à haut bords. Bien huiler.
Y verser la préparation.
Pour l’esthétique, il importe d’harmoniser la
couche supérieure qu’il faut lisser ou strier à
la fourchette, à votre goût (les stries donnent une
croûte plus craquante, mais c’est un peu moins esthétique).
Four chaud, cuire environ quarante minutes. Surveiller. Ça
doit gonfler et monter… Et ressembler à la fin à
un lingot d’or en plus sombre.
Servir un peu plus que tiède, mais pas chaud.
Arroser sa part de jus de citron.Briks au thon
Très facile à faire, il faut seulement prévoir
d’acheter des feuilles de briks. Pas évidentes à
trouver, mais c’est une entrée sympa pour les petits
dîners d’amoureux.
La préparation : deux ou trois pommes de terre bouillies,
deux œufs durs, une boîte de thon à l’huile.
Mélanger le tout ; écraser à la fourchette
; saler, poivrer.
Remplir (deux feuilles de briks par personne) de cette préparation,
les plier en triangle et les frire dans une poêle.
Laisser égoutter sur du papier absorbant. Déguster
chaud. Avec un petit rosé frais, c’est délicieux.
La
pastela
Ce plat de fête m’enchantait. J’aimais sentir
sous ma dent ce mélange de textures, de choses molles (la
pomme de terre) et d’ingrédients d’une consistance
toute différente (la miga acidulée, l’œuf
dur…).
Éplucher et faire bouillir dans de l’eau salée
un bon kilo de pommes de terre. Faire bouillir trois œufs (dans
la même eau)
Pendant que ça cuit, prenez le temps de préparer la
miga (une préparation qui peut servir à plusieurs
plats différents).
La miga est composée de viande hachée, de persil et
d’oignons. Mélanger à la main. Couvrir ensuite
de deux verres d’eau et d’une dose de safran. Mettre
à cuire pour assécher la préparation. Quand
il n’y a plus d’eau, rajouter le jus d’un citron,
un peu de cannelle et de noix de muscade. Bien mélanger et
écraser la viande à la fourchette.
Cuire de nouveau à feu doux jusqu’à évaporation
du liquide. Réserver.
Les pommes de terre sont cuites. Les mettre dans un grand plat et
les écraser à la fourchette en ajoutant six œufs,
un par un. Bien malaxer pour obtenir une pâte onctueuse.
Prendre ensuite un plat de four rectangulaire, huiler. Déposer
une bonne couche de pommes de terre en purée, puis une de
miga. Couper les œufs durs en rondelle, les étaler sur
la miga. Recommencer : une couche de pommes de terre, une de miga
et d’œufs. La couche supérieure est de pommes
de terre.
Bien lisser, Couvrir avec du jaune d’œuf (pour l’esthétique)
et creuser des sillons (des scarifications) à la fourchette.
Mettre au four une heure environ à feu moyen. Quand la croûte
est bien dorée, c’est prêt. Servir tiède.
Les
briks au thon
Très facile à faire, il faut seulement prévoir
d’acheter des feuilles de briks. Pas évidentes à
trouver, mais c’est une entrée sympa pour les petits
dîners d’amoureux.
La préparation : deux ou trois pommes de terre bouillies,
deux œufs durs, une boîte de thon à l’huile.
Mélanger le tout ; écraser à la fourchette ;
saler, poivrer.
Remplir (deux feuilles de briks par personne) de cette préparation,
les plier en triangle et les frire dans une poêle.
Laisser égoutter sur du papier absorbant. Déguster
chaud. Avec un petit rosé frais, c’est délicieux.
PAIN
Pain
de seigle
Les nourritures les plus simples sont aussi consolantes...
Un bon pain chaud beurré accompagné de café
peut constituer un goûter ou un petit-déjeuner délicieux.
Prendre un kilo de farine de seigle, du sel (une cuillerée),
vingt grammes de levure de boulanger. Etaler, mélanger et
rajouter progressivement de l’eau (1/2 litre environ).
Pétrir la pâte avec force, la retourner, l’écraser
avec ses poings pendant un bon quart d’heure. La recouvrir
ensuite d’un épais torchon et la laisser reposer (se
repose-t-elle vraiment ?) Puis l’étaler sur un plat
rond préalablement huilé. La pâte doit avoir
la forme d’une soucoupe volante.
Pour faire joli, on peut la décorer avec du jaune d’œuf,
mais dans ce cas-là, je préfère nettement voir
la matière brute de cette croûte brunâtre et
légèrement tachetée.
Faire chauffer le four au maximum avant de mettre le plat puis baisser
à 5-6.
Quelque trente minutes plus tard, le centre de la soucoupe a légèrement
enflé.
Sortir du four. Laisser tiédir un quart d’heure.
En couper une part (triangulaire), séparer en deux, étaler
le beurre qui va doucement fondre. Si on est gourmand, on rajoute
une toute petite pincée de sel.
Une gorgée de bon café chaud dessus, c’est l’orgasme
gustatif assuré.
PLATS
DE BASE
Les
boulettes
J’ai de la viande hachée, du persil, du cumin, du piment
rouge, du macis, un peu d’ail…
Pas trop long à faire, très bon, accompagné
de petits pois par exemple…
Persil haché, petite gousse d’ail, viande hachée,
du cumin mais pas trop, piment rouge, une grosse pincée,
piment fort, une petite pincée, huile, sel, poivre.
On se retrouve devant une petite montagne de viande rouge recouverte
de vert, parsemée de poudres orangées, marrons, rouges
et de petites taches blanches.
Un volume doux, arrondi, sensuel se dépose mollement dessus
et l’éclaire d’un jaune éblouissant. La
luminosité de l’albumen transforme, enrobe et prolonge
la brillance du jaune d’œuf, ce soleil cellulaire.
Puis le moment attendu… Mes mains qui plongent enfin dans
cette matière encore légèrement froide qui
se réchauffe rapidement à ma chaleur. Je malaxe cette
pâte vivante qui réagit, se transforme, prend progressivement
la couleur d’une terre chaude parsemée de points rouges,
de brindilles vertes, de taches rosées… Entre mes doigts
glisse cette chair onctueuse que je pétris jusqu’à
épuisement du plaisir.
Comme toujours, quand le plaisir s’émousse, c’est
le signe qu’elle est prête…
Il s’agit maintenant de confectionner des petites mandarines,
des petites planètes à peu près rondes, roulées
dans les mains. Là encore, prendre son temps, éprouver
le plaisir du potier, du sculpteur, de l’artiste, jusqu’à
l’obtention de la forme parfaite, condensée, cohérente,
harmonieuse…
Recommencer tant qu’on a de la matière. Il faut affiner
le modelé, varier le volume et vérifier l’esthétique
de toutes les boulettes. Chacune est unique, née de vos doigts.
On en trouve toujours de plus réussies que d’autres,
et même, quelquefois, certaines frisent la perfection.
S’ennuyer est mauvais signe, les boulettes ne seront pas bonnes…
Le plaisir de faire doit coïncider avec le temps de fabrication,
ni plus, ni moins.
Une préparation parfaite est celle où le plaisir s’est
maintenu, où la tension est restée présente,
à la limite de l’urgence… Comme dans l’amour…
Tendu et fébrile… Avec la volonté d’être
au plus juste de soi-même…
Dernière étape, la cuisson dans un liquide safrané
et épais. On est maintenant dans les origines, un magma bouillonnant,
celui qui doit accueillir les planètes de chair fraîche.
Elles vont dorer à vue, se saisir, se resserrer. À
nous de les faire tourner, de leur donner un sens, pour les cuire
à point, pas trop, qu’elles soient tendres mais consistantes,
juteuses mais denses, esthétiques et colorées…
Les
brochettes
Là aussi il y a une recette universelle recréée
par chacun.
C’est peut-être le mets le plus ancien. Dès qu’ils
ont découvert le feu (il y a cinq cent mille ans environ),
les hommes ont fait des brochettes. Un bout de branche pointu sur
lequel on pique des morceaux de viande et ce que l’on veut
ou ce que l’on a : tomates, oignons, poivrons…
C’est déjà bon comme ça. Mais il y a
un secret. Si vous voulez que ce soit encore meilleur, plus goûteux,
et plus facile à digérer, il faut faire macérer
les viandes. Tout est dans la marinade !
Il y en a une infinité : à base d’huile, de
vin, de citron, de vinaigre blanc… Quelques épices :
du cumin, du piment doux, du piment fort, et de l’ail et du
persil…
La plus simple : huile d’olive, un peu de vinaigre blanc,
piment doux, cumin, un peu d’ail…
Enduisez bien vos viandes (agneau, bœuf, cœur, foie, etc.)
et laisser mariner deux ou trois heures avant de griller…
Puis embrocher les morceaux en alternant avec des légumes
frais. Surveiller la cuisson, mais, en principe, ils cuisent bien
ensemble.
Accompagner de pommes de terre cuites à la braise forcément.
Le
poulet au persil
Citron, safran et persil sont les trois fondamentaux de la cuisine
marocaine. Ils agrémentent beaucoup de mes plats préférés.
Variations possibles sur ce thème : viandes (de bœuf,
agneau, veau, volailles, abats), poissons...
Et d’abord, mon must, le Poulet au persil.
Inconsciemment, depuis que je m’étais mis à
la cuisine, je recherchais ce plat de poulet que j’aimais
particulièrement depuis toujours.
Il ne m’était pas apparu lors de ma première
lecture du livre de cuisine. J’avais pourtant recherché
les différentes façons d’accommoder le poulet,
mais celle que l’auteur nomme fell-cassada ne me disait rien,
ma mère ou ma grand-mère n’ont jamais utilisé
ce nom, mais c’était bien lui...
La lecture de cette recette a éveillé en moi une douce
joie, j’allais enfin réaliser ce plat proustien. Depuis,
il fait mon ordinaire : pas une semaine sans en manger une ou deux
fois.
Découper votre poulet puis faire revenir les morceaux avec
des oignons cuits à l’huile d’olive. Ajouter
une dose de safran et bien retourner jusqu’à ce qu’ils
prennent une belle couleur jaune doré.
Verser alors le jus d’un citron et recouvrir largement d’eau
salée et poivrée. Remuer.
Laisser cuire à feu doux pendant une demi-heure, puis mettre
la moitié d’un bouquet de persil finement haché
(mais pas trop). Laisser réduire et mijoter une bonne heure
à feu très doux. Remuer de temps en temps.
Les morceaux de poulet baignent maintenant dans une suave sauce
jaune emmêlée de particules vertes aux reflets dorés.
Verser la moitié de cette sauce dans une casserole accompagnée
d’un légume frais (ou en boîte ou congelés
: haricots, petites pommes de terre, petit pois... Moi j’aime
bien avec des haricots verts). Cuire une quinzaine de minutes.
Faire mijoter le poulet encore un quart d’heure (il doit être
tendre, presque fondant mais la peau encore craquante). Servir séparément.
Le
poulet au safran
Prendre un beau poulet (jaune) et enduire (toujours à la
main) d’un mélange d’huile et de safran. Masser
légèrement le poulet (c’est très agréable
comme sensation) pour faire doucement pénétrer la
mixture. Saler, poivrer. Le poulet est maintenant d’un jaune
luisant légèrement rougi.
Le poser délicatement dans un plat à four.
Dans le mélange d’huile et de safran qui reste (il
faut en mettre un petit verre au moins et une dose de safran), versez
des pommes de terre découpées en rondelles salées
et poivrées. Mélanger à la main pour faire
bien pénétrer. Puis ajouter plusieurs gousses d’ail
lavées mais pas épluchées. Les aplatir d’un
bon coup (avec un petit verre - celui qui vient de vous servir).
Voilà, c’est prêt à enfourner. Surveiller
la cuisson. La peau du poulet doit être craquante, pas sèche.
Au sortir du four, vous avez un magnifique monochrome jaune (avec
une infinité de nuances).
Présenter sur un grand plat rond. Le poulet doit être
au centre entouré de ses rondelles de pommes de terre. Un
soleil entouré de petits soleils...
La
kefta
Une solution quand on n’a pas trop le temps ou quand des amis
déboulent.
Viande hachée, bien sûr ; plein de persil coupé
au ciseau, du cumin et du piment doux obligatoirement, du piment
fort, un peu d’huile d’olive pour l’onctuosité.
Mélangez dans un plat. Malaxer à la main jusqu’à
l’obtention d’une pâte qui satisfait votre œil.
Préparer des petites boules rondes puis les aplatir, mettre
sur le gril. Surveiller, les keftas ne doivent pas être trop
sèches mais un peu juteuses.
Prévoir de l’harissa et des bonnes moutardes fortes.
Couper le persil au ciseau, ça dépend des goûts,
mais j’aime bien quand il y a beaucoup de persil et qu’il
n’est pas haché trop fin. Ça craque un peu dans
la bouche et ce n’est pas désagréable. Les dents
aiment bien se faire plaisir aussi. Elles aiment bien croquer, mordiller,
écraser, sentir des résistances différentes.
Les grands chefs (ou les petits), à part quelques-uns, ne
tiennent pas assez compte des plaisirs procurés par différentes
textures.
POISSON
Le
poisson
au four
Choisir une grosse daurade, un loup ou un saumon.
Préparer une mixture faite d’un verre d’huile,
d’une dose de safran, de sel et poivre. Vous remarquerez que
si le sel ou le poivre ne se dissolvent pas dans l’huile,
en revanche, le safran - et c’est une de ses qualités
extraordinaires - se propage dans l’huile jaune pâle
qui prend aussitôt une couleur soleil.
Enduire amoureusement le poisson (avec les mains, c’est mieux).
Bien faire pénétrer.
Coucher sur un plat en verre.
Découper deux citrons en rondelles, en couvrir le poisson.
Découper en deux moitiés quelques tomates et ajouter
dessus quelques feuilles de persil (finement hachées).
Arranger les tomates sur le plat. Vous avez sous les yeux une forme
oblongue recouverte de cercles jaunes entourée de rouges
et verts.
Faire cuire une demi-heure au four chaud.
Couper des pommes de terre en gros morceaux, huiler un deuxième
plat, saler, poivrer, un peu de safran. Mélanger. Les mettre
dans le four en même temps que le poisson (elles s’imprègneront
de son fumet).
Servir séparé ou dressés ensemble dans un grand
plat. Présenter le poisson bordé de tomates et cerné
de pommes de terre dorées.
Sauce (tchermla)
pour accompagner le poisson. Qu’il soit bouilli, frit ou grillé,
on peut l’accompagner de ce condiment.
Huile, piment rouge doux, piment rouge fort (très peu), cumin,
et le jus d’un citron. Saler, poivrer, mélanger pour
obtenir une sauce onctueuse. En couvrir largement le poisson choisi.
Délicieux…Brochettes
Là aussi il y a une recette universelle recréée
par chacun.
C’est peut-être le mets le plus ancien. Dès qu’ils
ont découvert le feu (il y a cinq cent mille ans environ),
les hommes ont fait des brochettes. Un bout de branche pointu sur
lequel on pique des morceaux de viande et ce que l’on veut
ou ce que l’on a : tomates, oignons, poivrons… C’est
déjà bon comme ça. Mais il y a un secret. Si
vous voulez que ce soit encore meilleur, plus goûteux, et
plus facile à digérer, il faut faire macérer
les viandes. Tout est dans la marinade !
Il y en a une infinité : à base d’huile, de
vin, de citron, de vinaigre blanc… Quelques épices
: du cumin, du piment doux, du piment fort, et de l’ail et
du persil…
La plus simple : huile d’olive, un peu de vinaigre blanc,
piment doux, cumin, un peu d’ail…
Enduisez bien vos viandes (agneau, bœuf, cœur, foie, etc.)
et laisser mariner deux ou trois heures avant de griller…
Puis embrocher les morceaux en alternant avec des légumes
frais. Surveiller la cuisson, mais, en principe, ils cuisent bien
ensemble.
Accompagner de pommes de terre cuites à la braise forcément.
Le
gigot mariné
J’ai une recette où, avant de le cuire au four, on
fait mariner le gigot dans une préparation simple à
faire.
Un verre d’huile, piment doux, cumin (une petite cuillère),
et vinaigre (une grande cuillère). Mélanger pour obtenir
une sauce uniforme.
Enduire le gigot à la main en le caressant bien pour faire
pénétrer la marinade en surface. Laisser reposer.
Recommencer l’opération deux ou trois fois.
Laisser reposer une heure ou deux, puis mettre au four très
chaud. Faire sauter les pommes de terre à part.
Le fumet qui s’en dégage rappelle les senteurs de l’Orient.
Agualimon
J’avais repéré la recette dans mon fameux livre,
mais je ne me suis décidé qu’aujourd’hui
Extraire le jus de quatre citrons. Mettre au frais dans une bouteille
fermée.
Passer la peau (avec la pulpe qui reste) dans un hachoir. Hacher
menu.
Dans un saladier, verser un litre d’eau, ajouter la pulpe
et laisser reposer vingt-quatre heures.
Le lendemain, faire un sirop léger en faisant bouillir un
autre litre d’eau avec 300 grammes de sucre et une cuillérée
de vanille liquide. Porter à ébullition puis laisser
refroidir.
Pendant ce temps-là, filtrer le mélange avec la pulpe
en le malaxant un peu.
Verser ensuite dans le même saladier le jus de citron, le
sirop et le jus filtré. Mélanger et mettre au congélateur.
Boire très frais.
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